Je ne veux pas vieillir …


L’article du docteur Caloni » Ne confondons pas « , paru dans le Monde du 16 août, nous a valu une longue lettre de M. Marc Losson, directeur de maison de retraite, dont voici l’essentiel : Vous pouvez partager un article en cliquant sur les icônes de partage en haut à droite de celui-ci.
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À lire M. Caloni, on est d’abord soulagé, la vieillesse n’existerait qu’au bout du parcours, on l’attraperait en fin de retraite comme la grippe à la fin de l’hiver. Moi, des vieux, l’en vois partout, et bien avant la retraite.
Cela fait trente-cinq ans que je vis, mais j’ai déjà vu beaucoup trop de vieux enfants, de vieux adolescents, de vieux couples coincés dans leur cœur, leur moral, coincés dans leurs certitudes ; ça vieillit, les certitudes. J’ai vu trop de personnes vieillies depuis trop longtemps comme des serpillières qui auraient trop servi, j’ai vu trop de vieillards qui ne meurent plus à force de ne plus vivre. J’ai vu trop d’adultes couchés, fatigués d’attendre la retraite, l’avancement, la place du voisin, le pavillon du voisin, comme on attend le printemps ; un printemps fait de fleurs en plastique, celles qui durent éternellement, jamais jeunes, jamais vieilles, jamais mortes vraiment, fleurs sans vie, vies prothèses, vies de serre, vies de caisse d’épargne, vies fanées dès le matin pour que ça dure plus longtemps.
Je crois que la vieillesse surgit à fond de train au sortir de l’enfance, que j’ai vieilli de mille ans, en quelques secondes, du spectacle de mes illusions assassinées, de mes rêves broyés, congelés par la social-démocratie envahissante, porteuse d’un moralisme économique qui atteint péniblement les espoirs d’un caddie de chez Carrefour, porteuse de rêves châtrés à mi-chemin, dissous à l’eau bénite des caisses d’épargne.
Sauver les gens, et tout de suite
Il faut dire aux gens que la vieillesse, ça vous prend à vingt ans, quand depuis l’adolescence on vous l’assène à coups de massue, sélection et têtes hautes trop bien rasées. La vieillesse, ce n’est pas dans les hospices et les maisons de retraite qu’elle se cantonne ; ce serait trop simple. C’est peut-être même parce que nous sommes de vieux adultes sans rêves, sans imagination, que les vieux se retrouvent parqués dans des maisons de fin de vie, à cent, deux cents et parfois plus.